dimanche 10 juin 2007

Le client

Le client souverain décide du monde. Il défait les grands et les petits, oriente les productions, provoque les migrations ou les guerres.
Il achète voitures, pétrole, ordinateurs, services, gaz, électricité, eau, nourriture, transport, vacances, matières premières . Il se dirige toujours sur le meilleur rapport qualité prix tel le consommateur son cousin.
Le client ne se réduit pas au consommateur . Un client, qu'il soit individu ou entreprise peut acheter, transformer, revendre, en consommant ou non.
L'entreprise, cliente de ses fournisseurs ou partenaires, s'oriente, comme l'individu, vers la meilleure offre.
Le client élimine. Il élimine le plus cher, le petit commerce, les entreprises familiales, le logiciel commercial. Un seul critère est déterminant: le prix.
Le client peux aussi se faire du mal, il va faire ses courses à l'hypermarché, éliminant le commerce de proximité où travaille sa fille.
Il achète des voitures qui rejette du CO2, qui réchauffe la planète, et des particules fines polluantes qui rendent allergique et malade sa progéniture. Il achète des vêtements fabriqués ailleurs et détruit son propre emploi dans son usine de textile. Il préfère les beaux emballages en plastique couverts d'encre polluante qui rejètent beaucoup de dioxines dans les incinérateurs distillant le cancer à sa femme.
Il aime regarder des films de plus en plus violents, dans lesquels le meurtre est présent de manière systématique, mais il regrette que les lycéens imitent ces comportements dans les établissements scolaires.
Le client achète des actions de la société A, qu'il revend aussitôt pour en acheter d'autres de la société B qui offrent de meilleures perspectives de plus-values immédiates.
Avec cet argent frais la société B lance une OPA, réussie, sur la société C, où travaille le père du client, puis licencie massivement pour faire des économies d'échelle.
Le client ne comprend pas qu'il est à l'origine de tous les maux.

samedi 9 juin 2007

solidarité


Par glissement de sens, la solidarité devient l'action d'aider autrui. "Un monde plus solidaire" résonne comme slogan de campagne ces jours ci.
Mais la solidarité n'équivaut pas à la générosité comme le note André Comte-Sponville. La solidarité amène une obligation mutuelle, un contrat, la générosité est une action désintéressée.
La solidarité établit un lien réciproque entre deux ou plusieurs personnes. Nous nous engageons mutuellement envers l'autre. Ainsi fonctionnent les assurances, les mutuelles, les syndicats ( "Solidarnosc" le bien nommé).
Avant de devenir dans l'esprit d'aujourd'hui une action dotée d'une aura de bienfaisance, la solidarité définit un système où chacun a intérêt à aider l'autre, engendrant une efficacité remarquable.
L'intérêt alimente dans la majorité des cas les actions individuelles. Lorsqu'il est croisé avec l'intérêt de l'autre, nous créons un système indestructible.
Ainsi les paysans du siècle dernier qui devaient couper et rentrer les foins souvent rapidement, soumis aux aléas climatiques, travaillaient ensemble dans le pré d'un seul, pour accélèrer le ramassage. Tour à tour chacun bénéficiait de cette solidarité.
La solidarité n'est pas réservée aux individus.
Les entreprises sont maintenant souvent solidaires des mesures préservant l'environnement et s'affichent volontiers "vertes", car elles en attendent en retour une image et un chiffre d'affaire amélioré.
Vive la solidarité !

vendredi 8 juin 2007

Ignorance

Pendant la campagne des législatives chaque parti expose ses candidats à la télévision. Ils apparaissent de face, vous regardant dans les yeux, parlant lentement et distinctement.
Curieusement, tentez l'expérience, le regard est aimanté sur le bas de l'écran où défilent les sous-titres correspondant au discours de notre politicien, quasiment synchronisés.
Curieuse situation où de chaque côté de la petite fenêtre chacun lit le même prompteur et ne regarde pas son interlocuteur, dans une ignorance partagée.

samedi 2 juin 2007

Croissance


L'accroissement de la production de biens et de services dans un pays sur une année définit ce qu'on entend habituellement par croissance économique.
Si j'entends bien le discours uniformément diffusé par les partis politiques, les économistes, les médias en général, la création d'emplois dans notre pays se trouve directement en dépendance de la croissance économique.
Et c'est pour moi un premier mystère. Car toutes les entreprises partagent l'objectif de produire plus à moindre coût, en particulier sans augmenter les coût salariaux donc sans embaucher. L'augmentation de la productivité, à masse salariale constante, parait en tête de tous les mantras les plus ressassés, en usine, en SSII ou ailleurs.
Pour une usine, une banque, un commerce, embaucher n'est pas une fin mais un moyen.
Le deuxième mystère apparait lorsqu'on considère que nos sociétés sont destinées à croître. Economiquement ou démographiquement. Il n'est de pire catastrophe que d'envisager une démographie en baisse, une population décroissante.
Parce qu'à contrario, pas de croissance ou croissance négative signifie chômage, ce qui reconnaissons le parait plus facile à assimiler : la production décroit donc moins de travail généré.
Mais si l'on rapportait l'acroissement de la population à l'accroissement de la production, il devrait être possible d'avoir une relation à peu près linéaire. Une population s'accroit de 1%, la production interne, à terme, en réaction, devrait s'adapter.
Si la population décroit de 1% à l'identique nous devrions constater une contraction de cette même production.
Mais nous ne vivons pas dans ce monde où la production se trouve corrélée uniquement au nombre d'habitants. Le pays "s'enrichit".
La production est liée au nombre de consommateurs , au nombre de biens et services et à la quantité consommés. On ne produit qu'au plus près de ce qu'on vend, et de ce qui est consommé.
Si nous consommions, France de 2007, comme dans les années 70, un réfrigérateur, une télévision, des vacances en France, pas d'ordinateur à la maison, pas de walkman, pas de PDA, etc... le taux de chômage serait aujourd'hui considérable.
Car non seulement la population a fortement augmenté, mais la production et la consommation de façon plus forte encore.
En 1975 le PIB en france était de 789.9 milliards d'euros, en 2006 il atteint 1593.7 milliards d'euros.
Lors du recensement de 1975 la population française atteignait 52,656 millions. En 2006 nous étions 61,538 millions.
Pendant que le nombre d'habitants augmentait de 17%, le PIB, donc la production, doublait.
Et le chomage devenait ... structurel.
Le dilemme posé apparait donc le suivant : consomme ou bien chôme.
La croissance mécanique qui couvrait les besoins essentiels santé, logement, éducation, nourriture a depuis longtemps été completée par une croissance du superflu , haute technologie à la maison, programme d'amaigrissement, cosmétiques ...
La vérité se situe bien là : de moins en moins de travail humain est nécessaire pour produire de plus en plus. ( cf La fin du travail)
Sauver le travail implique donc effectivement une course à la production du superflu : qui a besoin d'un Airbus A380 sinon Airbus , ses salariés, les actionnaires ? Les clients ressentent ils le besoin d'un avion géant ?
Qui a besoin de fibre optique pour lire ses emails à 50Gb/s ou regarder 3 chaines de télévision simultanément sinon Neuf Telecom, Wanadoo, les salariés et les actionnaires ?
Les jeunes chômeurs des cités ,vêtus de chaussures Nike ou Puma à 200 euros , témoignent de leur exigence de consommateurs dans un monde qui en retour n'a pas besoin d'eux comme travailleurs.
La croissance n'a de sens qu'au regard des besoins humains. Nos sociétés occidentales, sous cet angle, n'ont pas besoin de croissance, mais d'une meilleure répartition des biens.