Variation

Qui l'eut cru ? Elever des pigeons peut accoucher d'une théorie sur l'origine des espèces. Méthode suivie par Darwin qui observa le travail des éleveurs sélectionnant certains traits caractéristiques de ces colombidés pour tenter d'obtenir des variations durables et de nouvelles espèces. Il suffit alors de poser, en lieu et place de l'acteur ( l'éleveur) de cette sélection "artificielle", la Nature, pour arriver au concept de sélection "naturelle". Des variations héréditaires donnent un avantage décisif, par exemple un plus long bec pour aller au fond d'un trou chercher un ver ou plus de force dans le combat livré par les mâles pour se reproduire, dans la lutte que livre chaque espèce pour sa survie en présence de ressources limitées. Cette théorie repose sur la génétique et les lois de Mendel.
Mais cette théorie considère que la meilleure adaptation d'une variation de l'espèce ne repose que sur le phénotype, le caractère observable : dans notre exemple le bec, et ignore l'avantage induit par le comportement. Posséder un long bec pour aller plus profondément dans le sol chercher les vers peut se révéler un avantage inférieur à celui d'apprendre à gratter avec ses griffes la terre très profondément, plus profondément que la longueur du bec, avantage lui même inférieur à celui de noyer le terrain avec de l'eau pour faire sortir les vers, ou encore celui de créer un élevage de vers pour les manger. La génétique observe des variations durables grâce aux lois de l'hérédité. Mais les lois régissant les comportements présentent autant de persistence, chez l'homme, ils sont d'une certaine façon "hérités" d'une génération à l'autre. Si nous héritons quasiment des mêmes gènes que l'homo sapiens, nous n'héritons pas de ses connaissances. Les connaissances accumulées par l'espèce humaine, oralement, puis par écrit, ont déterminé ses capacités d'adaptation au milieu naturel plus que la longueur de ses bras et de ses jambes. Face au réchauffement climatique, s'il fallait compter sur une variation génétique pour adapter l'homme à l'anthropocène, il faudrait attendre des millions d'années.
La sélection naturelle opère donc sur l'homme avec des critères supplémentaires à ceux qu'a défini Darwin. L'homme se maintient, se multiplie et modifie la planète grâce à la connaissance, elle lui donne de nouvelles capacités d'adaptation en dehors de la génétique. Mais il est également capable d'influer lui même sur ses gènes, sans attendre les variations aléatoires qui ont donné naissance aux différentes espèces. Plus encore il transforme les autres espèces par manipulation génétique ou par sa simple présence et la planète par son activité industrielle. Les trois piliers de l'évolution des l'espèces définis par Darwin : variation, adaptation, sélection sont remis en question par l'espèce humaine.

 - la provenance et le contenu de la variation a changé : les comportements  de l'homme varient par les nouvelles connaissances acquises et il opère sur lui-même des modifications génétiques non aléatoires .
- son adaptation environnementale n'est plus seulement une fonction de son corps et de ses instincts: il peut se rendre sur des planètes hostiles grâce à la technologie qui augmente ses capacités et son adaptabilité.
- la sélection naturelle opère différemment : d'une part l'homme sait scientifiquement contrôler et sélectionner les naissances,  la sélection humaine pourrait donc compléter la sélection naturelle de l'environnement. D'autre part sont éliminées au cours des siècles les civilisations qui ne mettent pas la connaissance technique et scientifique au premier plan :  constatation et non jugement de valeur( cf tristes tropiques ). Enfin, concernant la sélection du partenaire sexuel, il est maintenant capable de se reproduire sans acte sexuel, en éprouvette, ce qui pourrait rendre la notion de  "meilleur(e) partenaire " très éloignée des critères de sélection actuels .

L'espèce humaine tend à uniformiser ses comportements, sa nourriture, sa langue, sa culture, ses échanges et à diffuser ses connaissances universellement, ce qu'on appelle la mondialisation. De temps à autre, dans ce monde où les ressources sont limitées, et dans lequel adviennent des éléments de cosmopolitique ( Cop21 ) surgissent des variations, des groupes humains qui rejettent le comportement majoritaire d'uniformisation, qui endossent la forme d'états ou de formations politiques et tendent à revenir à d'autres époques, en 622 ou 1940. L'avenir dira si ils seront sélectionnées ...

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