vendredi 26 janvier 2007

La mémoire

Qu'est ce que je voulais écrire? Ah oui la mémoire.
Le souvenir fait obstacle au temps, tel un congélateur il fige la matière, ou plutôt sa représentation. La mémoire se charge de mettre de côté des informations captées par la pensée et les sens. Réactivées un jour ces informations rejoignent la conscience : pensée retrouvée, odeur, lieu, personne, musique etc.
Mais comme il ne s'agit pas, lorsqu'on mémorise, de capter le parfum dans un vrai flacon pour en retrouver l'odeur ultérieurement, ou d'enfermer une véritable personne dans une pièce afin de la revoir un jour, il faut admettre que le souvenir est une représentation codée, stockée probablement dans le cerveau.
Mais pas seulement dans le cerveau, difficile d'imaginer le souvenir de l'être aimé résider physiquement dans le gros orteil et pourtant ... le corps tient lieu de dépositaire d'affects que l'on refoule, la mémoire emprunte, pour son empreinte, le corps tout entier.

Comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, nous mémorisons sans cesse, exactement comme nous respirons.
Ce peut aussi être un effort délibéré, par exemple l'apprentissage "par coeur", mais la plupart du temps nous somme capables de décrire ce que nous venons de faire sans avoir prévu de le mémoriser.
Il s'agit même d'une condition pour raisonner logiquement.
Comment un souvenir revient-il à la conscience ? Cette action ne provient pas de la volonté, tout au plus souhaite-t-on plus ou moins intensément pouvoir "se rappeler" ( soi même), comme le chasseur siffle son chien afin de le rappeler.
Le souvenir surgit selon plusieurs modalités.
Très soudainement : "j'ai rendez vous dans une heure avec le médecin", rappel que rien ne connecte à la réalité du moment. Mais il survient également par association avec les sens: j'entends une musique qui me rappele une scène, un souvenir est ramené par une effluve dans le sillage d'une femme. Un interlocuteur peut servir de catalyseur pour puiser dans une histoire oubliée, un moment vécu ensemble.
De ces trois modes, le premier amène le plus d'interrogations. Quelque chose, qui n'est pas notre conscience, distille des pensées qui remontent à notre esprit, ou au contraire lui dissimule, en dehors de sa volonté. Merci Sigmund.
Absorbé dans ma lecture, je pense tout à coup que je suis invité chez des amis à dîner ce soir. Comment se déclenche ce rappel en dehors de toute association?
Ce mécanisme très pratique pour être à l'heure est aussi très effrayant: personne n'est totalement maître de ce qu'il pense. Quelque chose peut surgir de la mémoire et faire irruption.
La pensée se nourrit de ces phénomènes aléatoires.

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