vendredi 27 novembre 2015

Le partisan

L'Esthétique est marquée par l'opposition beau/laid, la morale par celle du bien et du mal, la politique par celle de l'ami et de l'ennemi. Cette analyse provient de Carl Schmitt, juriste du début du siècle qui appartint au parti national socialiste - ce qui ne rend pas sa pensée caduque- qui pense que la distinction ami/ennemi fonde la notion de politique.
L'explication en est donnée dans l'ouvrage "Notion de politique" en 1932. Plus tard, après la deuxième guerre mondiale, il développera la théorie selon laquelle l'affaiblissement des états suite à l'émergence d'instances extra-étatiques comme la société des nations puis l'ONU  transforme le "jus belli", droit de chaque état à la guerre, en droit international qui juge les guerres justes ou injustes. La guerre classique entre états pour le partage du territoire, thème du "Nomos de la terre" a tendance a disparaître au profit de conflits qui ressemblent plus à des opérations de police internationale, fondées sur le droit, pour mettre au pas des organisations politiques ou des états brigands. Le domaine politique n'est plus alors contraint à la définition de l'Etat ni à ses limites et l'ennemi peut être trouvé ailleurs que dans l'Etat. Le politique peut s'exprimer sous d'autres formes. Apparait alors la figure du "partisan", ennemi qui n'appartient pas à l'armée régulière vaincue, mais forme une entité politique "irrégulière" prête à la guerre totale. La guerre n'est plus un moyen politique d'arriver à soumettre l'ennemi à sa volonté comme chez Clausewiz, condition à la paix, mais a pour but sa destruction et sa disparition. La figure du partisan se rencontre aussi bien dans les guerres de libérations coloniales du début du siècle, viêt minh en Indochine , FLN en Algérie, Parti communiste en Chine, qu'aujourd'hui en Palestine, ou avant guerre en Espagne. Pour son adversaire, le partisan se nomme "terroriste" car il peut user de moyens qui n'appartiennent pas à la guerre conventionnelle et qui sèment la terreur.
L'affaiblissement d'un état peut entraîner une guerre civile où s'affrontent les ennemis internes. Lorsque les motivations de l'hostilité sont issues de conflits d'ordre religieux, dès lors que la guerre survient entre les parties alors le conflit passe de l'ordre religieux au domaine politique.
Daesh correspond assez bien aux définitions de Schmitt, née sur les ruines de l'Etat irakien, organisation politique à fondement religieux, figure du terroriste/partisan, dont l'ennemi semble être le monde entier.
Le problème de la définition du politique chez Schmitt, c'est qu'elle amène à penser l'impossibilité de la paix, puisque le politique nécessite la définition de l'ennemi pour assurer l'unité. L'unité existe malgré tout, en dehors de tout ennemi et de toute guerre, même si la guerre la renforce, et le politique dans l'état n'a pas disparu depuis l'ONU. Simplement la politique mondiale est en train de naitre, la COP21 en est un exemple. Je préfère penser qu'on se dirige "vers une paix perpétuelle" comme le prédisait Kant, qui pensait déjà "une société des nations".


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